Pierre André Benoit est né en 1921 à Alès et il est mort en 1993 sans avoir quitté sa région natale. Il n’a suivi aucun plan de carrière mais s’est construit par les rencontres comme un éternel oisif. Dès l’époque des bibliophiles alésiens, véritable portrait de jeune homme en éditeur, Pierre André Benoit comprend qu’il veut faire des livres voués à la défense et à l’illustration de la poésie où l’artiste serait un complice actif. C’est l’écho des mots du poète sur le peintre qui est la condition préalable à l’illustration et jamais le contraire. En dépit des progrès techniques réalisés dans l’imprimerie et de la stature croissante des artistes contactés, P.A.B. continuera de pratiquer toute sa vie l’art de la débrouillardise à quatre sous. Nécessité et agrément faisant loi, chaque livre sera une aventure initiatique pour laquelle l’expérience du livre précédent servira peu. P.A.B. s’amusera beaucoup trop, entre ses nombreuses années de marasme, pour avoir le temps de grandir car à quoi bon atteindre l’âge de la maturité lorsque l’on crée des livres. Certaines rencontres ont été plus importantes que d’autres : Seuphor pour la découverte de l’art abstrait, Char et Braque pour leur classicisme, Jean Hugo pour son charme franciscain, Rose Adler par son amour des petits livres, Picasso parce que c’était Picasso, Dubuffet pour son indépendance, Vieira da Silva pour son raffinement. Ne pas citer les autres est un crime, dont P.A.B. ne se fût pas rendu coupable, sauf en cas de brouille, ce qui se produisait parfois. Ils sont tous cosignataires des livres de P.A.B. mais tous, sauf Dubuffet qui a entraîné P.A.B. vers des terres inconnues, ont réalisé des choses différentes grâce à leur rencontre avec l’éditeur alésien. Dans la rigueur et le respect de l’esprit du livre classique, l’œuvre de P.A.B. est un pied de nez au culte du beau livre en pur papier du moulin de la Chiffonnière et à la couverture en peau d’ornithorynque vieillie en fût. Le livre est un acte modeste et essentiel. Il ne paie pas forcément de mine mais son contenu doit réjouir l’âme et le corps. Soucieux de la survie de son œuvre au-delà d’une diffusion qu’il savait et voulait rare, P.A.B. a souhaité bâtir un écrin à son image, un lieu où l’œuvre se découvrirait progressivement jusqu’au dévoilement complet qui s’effectue, tel le dernier sanctuaire d’Eleusis, dans la bibliothèque. L’idée de base est belle et fonctionnelle. Le musée bibliothèque Pierre André Benoit est à la fois spectaculaire et intimiste, lumineux et secret, antre du livre et champ de la peinture. Les enfants peuvent s’ébattre bruyamment au milieu des pots de peinture dans la grande salle du rez-de-chaussée tandis qu’un bibliophile s’abîme dans le déchiffrement d’une rare correspondance poétique exposée dans une vitrine de la bibliothèque silencieuse du deuxième étage.(…) Axel Hémery Conservateur du musée bibliothèque Pierre André Benoit à Alès de 1993 à 1998. Actuellement conservateur au musée des Augustins à Toulouse.
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