« Sans jamais se réunir pour former à leur tour quelque « École » que ce soit, certains de ces poètes se sont pourtant retrouvés un temps autour de la revue L’Éphémère (publiée de 1966 à 1973). Ils ont nourri des relations d’amitié avec quelques peintres ou sculpteurs, tels Giacometti ou Tal Coat. Auprès de ces artistes, ils ont pris des leçons de dépouillement, ont acquis le sens de “l’abstraction lyrique", ont perçu l’espace comme un lieu d’affrontement, ont redécouvert la matière et la lumière, ont réfléchi sur l’illisibilité et sur la discordance. Ainsi Dupin parlant de Tapiès : “Signes bruts, lapidaires, brouillés, suspendus, ils n’ouvrent que sur l’évidence de leur illisibilité présente, leur incongruité de traces silencieuses”. La parole de ces auteurs, à son tour, va se caractériser par son dépouillement, sa tension, son amenuisement et sa frugalité, à la manière, par exemple, des sculptures de Giacometti. Fascinée par l’immédiateté matérielle de l’oeuvre d’art, son superbe mutisme, son indépendance à l’endroit de la lisibilité, l’écriture de ces poètes « tente désespérément de retrouver l’accès abrupt dont la nostalgie la ronge. » Jean-Michel MAULPOIX